Pour la première fois depuis 1973, le sommet France-Afrique s’est déroulé à Montpellier avec l’absence quasi totale des présidents du continent. Entrepreneur, artiste, sportif et acteur de la société, Emmanuel Macron a choisi l’option de miser sur la jeune génération pour « refonder » les relations entre l’Hexagone et l’Afrique.
Entre autres sujets abordés, les jeunes africains venus par centaine ont interpellé le chef de l’état français sur le sort des migrants en Méditerranée, sur la restitution des œuvres d’art pillées au Bénin, et encore sur la réduction du nombre de visas pour les ressortissants maghrébins.
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Des questions brulantes sur la table
L’aboutissement de ce panel a été la résultante des dialogues menées par l’intellectuel camerounais Achille Mbembé, chargé de préparer le sommet, pendant des mois. Dans son rapport d’activité remis au président français, ce mardi, M. Mbembé estime que la France est en déphasage avec les « nouveaux mouvements et des expérimentations politiques et culturelles » portés par la jeunesse africaine.
Ce vendredi, sous les slaves d’applaudissement des quelque 3000 participants, les onze jeunes Maliens, Camerounais, Burkinabè et Kenyans, invités à dialoguer, ont fustigé sans complaisance, le « néocolonialisme », « l’arrogance » ou le « paternalisme français ». Sur ces questions, les panélistes ont secoué les usages et ont interpellé sans ménagement, Emmanuel Macron.
Celui-ci, défendant sa « sincérité » et niant tout « paternalisme », s’est dit « bousculé ». Cependant, au cours d’un débat parfois tendu, le chef de l’état a réitéré ses fondamentaux sur les sujets brulants soulignés par les jeunes.
« Arrêtez votre discours paternaliste ! Nous n’avons pas besoin d’aide, nous avons besoin de coopération », lui a objecté une jeune Malienne, Adam Dicko, qui n’a pas hésité à interrompre le président.
Cheikh Fall, un blogueur sénégalais a, de son côté, exigé que la France demande pardon au continent africain pour les crimes qu’il a commis au cours de la colonisation. « Et cessez de coopérer et collaborer avec ces présidents dictateurs ! Et programmez un retrait progressif et définitif de vos bases militaires en Afrique ! » a-t-il poursuivi.
La Kenyane Adelle Onyango a, quant à elle, sommé le président français à « mettre fin à la France-Afrique et ses pratiques opaques ». Elle a par ailleurs pointé de doigt les contradictions d’une France « arrogante », « enlisée dans des questions de racismes et qui vient donner des leçons de démocratie aux Africains ».
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Pas de pardon
Même s’il ne nie pas « la responsabilité immense de la France dans le commerce triangulaire et la colonisation », le président Macron s’est de nouveau refusé à demander pardon, privilégiant « un travail de vérité »et non de « honte de soi et de repentance ».
Pour se décharger des accusations relatives au soutien aux dictateurs et aux critiques sur les interventions militaires, il a martelé que « la France est là militairement à la demande des pays africains ». Il a également renvoyé ces derniers à leurs prérogatives : « c’est pas moi qui vais faire l’école, c’est pas moi qui vais faire la police… Jamais une intervention militaire ne remplace le travail d’un État », a-t-il lancé. Pour lui « ce continent [Afrique, NDLR] qui est jeune, est dirigé depuis trop longtemps par des personnes qui sont vieilles ».
Par ailleurs, Emmanuel Macron a annoncé, à l’issue de ce sommet, que la France va désormais restituer dès fin octobre, 26 œuvres d’art provenant du « trésor du Roi Béhanzin », pillé au palais d’Abomey, en 1892 durant les guerres de conquête menées par le colonel Dodds. Un avènement attendu par les Béninois et généralement les Africains depuis 2018.